Les Guerres Médiques sont certainement l’un des épisodes les plus marquants de l’Histoire de la Grèce Antique. Elles concrétisent le passage temporel de l’époque archaïque à la période classique. Pour la première fois de l’Histoire, les Cités-États grecques du bassin Égéen, dont chacune correspondait à un état souverain et indépendant, prennent conscience de leur unité proprement grecque et se liguent ensemble pour contrer un ennemi commun. Cet ennemi, c’est la menace orientale des Perses Achéménides (le nom de la dynastie royale au pouvoir) qui règnent sur un empire territorial immense de l’autre côté du détroit du Bosphore, allant de l’Anatolie (la Turquie actuelle) aux portes de l’Inde. À la tête de ce goliath impérial, on retrouve le Grand Roi perse Darius qui entend bien étendre son hégémonie sur la péninsule grecque.

La Première Guerre Médique
Le conflit prend ses sources au début du Ve siècle avant J.-C. en Ionie, sur la côte ouest de la Turquie actuelle. À cette époque, les cités grecques ioniennes, fondées lors de la colonisation archaïque, qui s’étend approximativement de 775 à 600 avant notre ère, sont sous l’emprise de tyrans locaux à la solde des satrapes (l’équivalent d’un gouverneur de province) perses.

À une si haute époque, nous avons très peu de sources pour nous informer de tous les détails de la situation politique. Nous savons toutefois qu’en -499, les Cités-États ioniennes se révoltent contre l’autorité perse en suivant l’appel du tyran de Milet, Aristagoras, qui renonce à son plein pouvoir en le remettant aux citoyens de sa cité. Les insurgés encouragent alors les Grecs du continent à les soutenir dans leur lutte contre la dynastie des Achéménides. Néanmoins, les cités d’Europe n’éprouvent aucun sentiment de solidarité avec les Ioniens ni d’ailleurs d’hostilité envers les Perses. Ainsi, seules les cités de l’île d’Eubée et la cité Athènes répondent à l’invitation de leurs consœurs en envoyant 25 navires de guerre en renfort.
Le contingent grec parvient à s’enfoncer dans l’arrière-pays perse et pille la ville de Sardes, important centre urbain de la région, en -498. Face à un tel affront, le Grand Roi organise une féroce contre-attaque. En effet, en -494, les Perses écrasent la flotte grecque, saccagent entièrement la ville de Milet et réduisent tous ses habitants en esclavage. De plus, pour se venger radicalement, Darius orchestre une expédition maritime ayant pour objectif la soumission inconditionnelle des cités d’Europe ayant appuyé les rebelles.
Ainsi, en -490, après avoir ravagées l’île d’Eubée ainsi que ses cités, les forces perses, fortes de plusieurs dizaines de milliers de combattants, mettent pied à Marathon; une ville se situant seulement à quelques kilomètres d’Athènes. Les Athéniens, guidés par le stratège Miltiade, sont en grave situation de désavantage numérique; la défaite parait inévitable. Cependant, les hoplites (fantassin grec pesamment armé) athéniens réussissent à repousser les envahisseurs orientaux qui sont alors contraints de mettre les voiles et de se replier en Anatolie. La victoire de Marathon est si miraculeuse qu’on se doit de croire en une intervention divine.

La Seconde Guerre Médique
Alors que les cités du bassin Égéen ne se préoccupent pas d’organiser une nouvelle stratégie défensive en vue d’un retour des Perses, le Grand Roi Xerxès, qui a succédé à son père Darius en -486, prépare minutieusement sa revanche. Ce dernier favorise une offensive maritime soutenue par une intervention terrestre empruntant la route du nord : un canal est creusé, des ponts sont construits et des magasins de ravitaillement sont constitués le long de l’itinéraire.
En -481, devant la menace imminente de l’invasion perse, les cités grecques se rassemblent à Corinthe et acceptent exceptionnellement de mettre leurs conflits internes de côté pour s’unir et préparer la résistance. Alors que les Spartiates préconisent une défense terrestre axée autour de l’hoplite et de la phalange, les Athéniens, sous les conseils de Thémistocle, optent pour la construction d’une flotte navale composée de 200 trières (navire de guerre grec qui comportait trois rangs de rameurs).
Le nord de la Grèce tombe facilement aux mains de Xerxès qui poursuit inexorablement sa descente conquérante vers Athènes. En -480, l’armée terrestre grecque, commandée par le spartiate Léonidas, prend position aux Thermopyles, en Thessalie, face aux forces perses qui s’avèrent être environ 20 fois plus nombreuses que les hoplites déployés. Devant l’inévitable massacre, Léonidas fait partir la majorité de ses troupes, ne gardant qu’un petit nombre de combattants ayant pour objectif de résister jusqu’à la mort pour ainsi assurer la retraire et le redéploiement ultérieur de leurs compatriotes (d’où le scénario du film « 300 »). Fort de sa victoire, Xerxès ravage la Grèce centrale et contraint les cités de Béotie à la sujétion.

C’est à ce moment que Thémistocle convainc la flotte athénienne, le dernier espoir des Grecs libres, de s’engager dans le filiforme détroit de Salamine; un canal maritime familier aux trières athéniennes. Lorsque la bataille s’enclenche en début septembre -480, l’immense armada perse est rapidement bousculée dans cet endroit trop étroit pour ses avirons. Les navires orientaux s’entrechoquent, s’endommagent et se désagrègent; c’est le chaos total. Face à sa défaite inattendue, le Grand Roi se replie en Asie, laissant son général Mardonios conduire le reste de son armée en Thessalie pour s’y redéployer.
Quant à elles, les Cités-États grecques toujours libres se réunissent à Platées, en -479, et y prononcent le serment de chasser inconditionnellement les Achéménides en dehors de la Grèce. La bataille terrestre de Platées qui s’en suivit s’étend sur trois éprouvantes semaines, mais elle aboutit finalement à la mort de Mardonios et au retrait complet des troupes perses d’Europe. C’est ensuite au tour de la flotte perse de se faire achever par les Athéniens à la bataille de Mycale, près de l’île de Samos, sur la côte ionienne.
Cette fois-ci, ce sont réellement les rameurs des trières, issus des couches pauvres de la population citoyenne d’Athènes, qui sauvent le monde grec de la domination orientale. Avec 170 rameurs par navires, c’est une masse très importante de citoyens qui se retrouvent brusquement à l’avant-scène de la vie politique athénienne. Ces derniers exigent une plus grande responsabilité dans l’administration de la société et refusent de laisser le pouvoir concentré entre les mains des aristocrates. Cela contribue considérablement à la concrétisation du régime démocratique qui naît quelques années plus tard dans la cité et qui se répand ensuite à travers le monde grec désormais unifié sous la bannière d’Athènes et de sa Ligue de Délos.
Adrien Larochelle
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Sources
AMOURETTII, M.-C., Le Monde Grec Antique, Paris, Hachette, 2011, pages 141-144.
Image de couverture : Léonidas aux Thermopyles, tableau de Jacques-Louis David, 1814, Musée du Louvre.
Très bien écrit. On apprend.
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Merci André, c’est apprécié.
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